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CAMEROUN : La crise anglophone : des exactions commises par les deux parties

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LIBREVILLE, 3 février (Infosplusgabon) - Dans les régions anglophones du Nord-Ouest et du Sud-Ouest, l’absence de véritable processus électoral permettant de venir à bout de griefs vieux de dizaines d’années contre le gouvernement Biya a contribué à la radicalisation du discours et des tactiques des activistes anglophones. Depuis la mi-2017, les séparatistes anglophones s’en prennent aux institutions gouvernementales et menacent, enlèvent et tuent des civils perçus comme se ralliant à la cause du gouvernement.

 

En 2016 et 2017, les forces de sécurité gouvernementales ont fait un usage excessif de la force pour réprimer des manifestations en grande partie pacifiques organisées par des membres de la minorité anglophone du pays qui réclamaient une plus grande autonomie pour leur région. Lors de manifestations fin 2017, les forces gouvernementales ont tiré à balles réelles, y compris à partir d’hélicoptères, tuant au moins douze personnes et en blessant des dizaines. Certains individus détenus dans le cadre de ces manifestations ont subi des actes de torture et des mauvais traitements.

 

En octobre 2017, les dirigeants séparatistes ont unilatéralement déclaré l’indépendance des régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest et la création d’une nouvelle nation appelée Ambazonie. Le mois suivant, le président Biya annonçait que le Cameroun était attaqué par des terroristes et jurait d’« éradiquer ces criminels ». Le rythme et l’ampleur des attaques des groupes séparatistes armés contre les forces de sécurité, les fonctionnaires et les institutions étatiques ont augmenté, surtout après l’arrestation et la déportation de 47 militants sécessionnistes présumés depuis le Nigeria en janvier 2018.

 

Atteintes commises par les forces gouvernementales

Human Rights Watch a découvert que les forces gouvernementales répondaient à l’insurrection séparatiste croissante en lançant des opérations de sécurité violentes à l’encontre des communautés soupçonnées d’appuyer les groupes sécessionnistes. Les forces de sécurité ont commis des exécutions extrajudiciaires, fait un usage excessif de la force envers les civils, torturé des séparatistes et autres détenus et employé à leur égard des pratiques abusives, et incendié des maisons et des biens dans des dizaines de villages.

 

Lors des attaques documentées par Human Rights Watch, les forces de sécurité auraient abattu plus d’une dizaine de civils, dont au moins sept personnes qui, selon des témoins, présentaient des déficiences intellectuelles, psychosociales ou physiques et qui ne s’étaient pas enfuies parce qu’elles ne pouvaient ou ne voulaient pas le faire. Au moins quatre femmes âgées sont mortes brûlées vives après la mise à feu de leur domicile par les forces de sécurité.

 

Human Rights Watch a également rendu compte de trois cas dans lesquels des membres des forces de sécurité ont détenu des personnes soupçonnées de soutenir la cause sécessionniste, puis les ont torturées et tuées pendant leur détention. Dans un quatrième cas, Human Rights Watch a analysé des preuves de torture filmées par leurs auteurs, qui semblent être des gendarmes. Les 24 et 27 septembre, neuf hommes auraient été exécutés par les forces de sécurité dans la ville de Buea, d’après des vidéos analysées par Human Rights Watch et un rapport du Centre for Human Rights and Democracy in Africa, une organisation non gouvernementale (ONG) locale.

 

Exactions commises par les séparatistes armés : attaques visant des étudiants, des enseignants et des écoles

Pour s’assurer du respect du boycott des écoles suite aux manifestations d’enseignants anglophones organisées pour faire valoir la discrimination qu’ils percevaient de la part du gouvernement national majoritairement francophone, les groupes séparatistes ont attaqué et incendié des dizaines d’écoles, menacé des enseignants, des élèves et des parents, enlevé des chefs d’établissement et attaqué violemment des enseignants et des élèves. En mars, des personnes dont on estime qu’il s’agissait de séparatistes armés ont attaqué un dortoir de lycée à Widikum, dans la région du Nord-Ouest, et abattu Emmanuel Galega, un élève.

 

Ces moyens de pression ont contraint la majorité des établissements scolaires à fermer leurs portes pendant l’année scolaire 2016-2017 et, d’après les estimations, 42 500 enfants n’avaient toujours pas repris leur scolarité en mai 2018, selon le Bureau des Nations Unies pour la Coordination des Affaires humanitaires (OCHA). La plupart des écoles n’ont pas rouvert leurs portes en 2018.

 

Le 30 avril, le père William Neba, le directeur du Collège St. Bede à Ashing, près de Belo, dans la région du Nord-Ouest, a été enlevé alors qu’il célébrait la messe avec des élèves. Il a été libéré deux jours plus tard. L’école a suspendu les cours le jour de son enlèvement. En septembre, des hommes armés non identifiés ont attaqué une école de filles à Bafut, dans la région du Nord-Ouest, enlevant cinq élèves et blessant grièvement le directeur.

 

En septembre, le gouvernement a avalisé la Déclaration sur la sécurité dans les écoles, un accord politique international visant à protéger le secteur de l’éducation lors des conflits armés.

 

Le 5 novembre, jusqu’à 78 élèves auraient été enlevés à Bamenda, dans la région du Nord-Ouest, par des hommes armés non identifiés. Ils ont été libérés deux jours plus tard.

 

 

FIN/INFOSPLUSGABON/MLL/GABON2021

 

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