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26 Octobre 2020
Tripoli, Libye, 26 octobre (Infosplusgabon) - La signature vendredi à Genève de l'accord de cessez-le feu permanent en Libye a accéléré la dynamique de la paix dans le pays, surprenant les plus sceptiques sur la possibilité de parvenir à la stabilité en Libye alors que les ingérences extérieures ont compliqué davantage un conflit fratricide prenant, au fil des ans, une dimension internationale, qu'influent les postions de certains pays étrangers.
Mais la volonté démontrée tout au long de ces derniers mois par les Libyens d'aller de l'avant et sortir leur pays de l'ornière de la violence et de la logique des affrontements militaires en trouvant une solution sauvegardant leur patrie, assurant son unité, son intégrité, sa souveraineté et préservant ses richesses et potentialités, a prévalu, malgré les contingences et obstacles qui se dressent.
La Mission d'Appui des Nations unies qui parraine depuis plus de neuf ans le processus politique libyen, s'est toujours trouvée confrontée à l'impasse des forces qui tirent vers l'arrière et sabordent tous les efforts pour parvenir à la paix étant donné qu'en définitive rien de fondamental ne différencie les Libyens ni les séparent.
Toutefois, dans l'euphorie qui a accueilli l'accord politique en Libye, des positions nuancées ont émergé ici et là du lot, suscitant des craintes que certains ne mettent en cause la solidité de cet accord de cessez-le-feu et sont sérieux en trouvant des griefs pour semer le doute et le compromettre en introduisant de nouvelles revendications ou soulevant d'autres aspects de la problématique de paix qui peuvent être réglé ultérieurement, l'essentiel actuellement est de stabiliser le pays en le débarrassant de l'effusion du sang des Libyens.
Ainsi les griefs et réserves formulées à l'encontre de l'accord de cessez-le-feu permanent ont trait à la recherche de garanties et mécanismes pour appliquer sa mise en œuvre ainsi que la nécessité des demander des comptes aux auteurs de présumés crimes de guerre et contre l'humanité perpétrés par certains, notamment la nécessité de ne pas absoudre ceux qui ont du sang sur les mains de leurs crimes.
Le ministre de la Défense du gouvernement d'union nationale, Salah al-Nemrouch, a appelé après la signature de l'accord de cessez-le-feu à commencer immédiatement "le retrait des mercenaires de toutes les installations pétrolières et sites militaires comme preuve de la sincérité de leurs intentions et de leur sortie définitive du pays, et à entrer dans une véritable réconciliation nationale pour que nous ne retournions pas au carré des guerres et des conflits.
Il a précisé que "les crimes commis pendant les périodes de conflit, seront tranchés par le pouvoir judiciaire libyen, d'abord, et si cela n'est pas possible, on recourra à la justice internationale".
Le ministre a réaffirmé qu'"il a été convenu sur le principe de tolérance zéro pour les crimes contre l'humanité et les crimes de guerre", appelant "à l'activation des institutions judiciaires pour offrir réparation aux victimes et punir les auteurs, tout en rejetant l'intervention de toute force extérieure, directement ou indirectement, dans les affaires intérieures de la Libye, à moins qu'elle ne soit formellement demandée par la partie légitime d'une assistance à la formation et des conseils techniques".
Il a appelé les Nations Unies à mettre en place des garanties pratiques afin que les termes de l'accord ne soient pas "bafouées" comme cela s'est produit plus d'une fois, ajoutant qu'il propose cela pour ajouter de la crédibilité et s'assurer qu'il n'y aura pas de recul à nouveau".
"Certaines compagnies de mercenaires présentes sur les sites pétroliers et la base d'al-Joufra pourraient être hors de contrôle. Et ils doivent être traités avec prudence et fermeté en même temps", a ajouté le ministre.
De son côté, le porte-parole de l'armée libyenne loyale au gouvernement d'union nationale, le colonel Mohamed Gounounou, a fait part de sa méfiance à l'égard "du succès de toute voie de paix dans laquelle le bourreau et la victime sont mis sur le même pied d'égalité sans garantir que des comptes soient demandés pour la responsabilité des personnes impliquées dans l'agression, dirigée par le criminel de guerre Haftar".
Le colonel Gounounou a souligné dans sa réaction à l'annonce de l'accord de cessez-le-feu, "leur manque de confiance dans la capacité des milices de Haftar à éjecter ou à demander la sortie de plus de cinq mille mercenaires de Wagner, de Syrie, du Soudan et du Tchad, tandis que Wagner continue à établir des camps, des fortifications et à creuser des tranchées".
Il a appelé la Mission de l'ONU à envoyer des observateurs dans les villes de Syrte, al-Joufra et Barak al-Chatti pour révéler le mouvement de milliers de mercenaires dans ces villes, retournant à Syrte et al-Joufra comme un point de rassemblement pour les mercenaires étrangers et les gangs locaux.
Le porte-parole de l'armée gouvernementale a affirmé que les assaillants contre la capitale n'avaient pas laissé de crime sans l'avoir commis et qu'ils ne faisaient pas confiance à leurs promesses qu'ils ont toujours violées.
Il a souligné qu'ils attendent une enquête des Nations unies qui révèle au monde les crimes de génocide contre les habitants de Tarhouna (sud de Tripoli), appelant les personnes touchées à se rendre immédiatement devant la justice pour leur rendre justice.
Le représentant permanent de la Libye auprès des Nations Unies, Taher al-Sunni, a souligné que "le succès de toute solution politique doit inclure l'instauration de la confiance, la réalisation de la justice transitionnelle, la réparation et la réconciliation nationale globale".
M. al-Sunni a ajouté dans un tweet qu'"il saluait tous les efforts pour réaliser l'arrêt de l'effusion de sang", notant qu'"il n'y avait aucun compromis à demander des comptes aux responsable qui ont commis des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité, car il s'agit d'une responsabilité nationale et morale qui ne sera pas soumise au délai de prescription".
Réagissant, samedi, le porte-parole officiel des forces du commandement général de l'armée nationale libyenne dirigée par Haftar, le général Ahmed al-Mesmari, a affirmé "le plein engagement du commandement général à respecter l'accord de cessez-le-feu signé à Genève sous les auspices de la Mission d'Appui des Nations Unies en Libye", souhaitant que "les volets politique et économique aient le succès réalisé par le volet militaire".
Le général al-Mesmari a ajouté, lors d'une conférence de presse, que "l'accord avait besoin d'un garant honnête et réel, en plus de forces de dissuasion pour œuvrer à son respect et à le mettre en œuvre, d'autant plus que certaines de ses dispositions visent les criminels recherchés pour des crimes criminels et terroristes, en plus des organisations terroristes".
Certaines parties des deux camps au conflit ont exprimé leurs craintes à l'égard de la non application des termes de l'accord évoquant des aspects liés à la justice transitionnelle et au dédommagement et réparations des victimes en raison des crimes commis durant le conflit armé en particulier la guerre de Tripoli suite à l'offensive militaire des forces de Haftar le 4 avril 2019 avant de subir une défaite fin mai 2020 laissant derrière elles des mines et des fosses communes qui ont été découvertes dans les régions au Sud de la capitale et à Tarhouna.
La création par le Conseil des Nations unies pour les droits de l'homme d'une commission d'enquête et la désignation de ses membres reflète , selon les observateurs la volonté de la communauté internationale de traduire les auteurs des crimes devant la justice.
Ces appréhensions ne sont pas partagées au niveau international où la priorité est de faire taire les armes et d'expulser les combattants étrangers pour ensuite se tourner vers les autres aspects de règlement post-conflit.
Ainsi l'Union européenne a affirmé a appelé les parties libyennes à "mettre pleinement et immédiatement en œuvre l'accord de cessez-le-feu", invitant les États membres de l'Union, tous les acteurs internationaux et régionaux à "soutenir sans équivoque les efforts libyens, de s'abstenir de toute intervention étrangère dans le conflit libyen et mettre fin aux violations de l'embargo contre les armes imposés par les Nations Unies, dans le plein respect des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité des Nations Unies".
Dans un communiqué, l'Union européenne a souligné la nécessité "pour tous les combattants et mercenaires étrangers de se retirer immédiatement de Libye", considérant que "toute intervention étrangère est inacceptable".
L'ancien Représentant des Nations Unies en Libye, le Libanais, Ghassan Salamé, a appelé les pays qui ont mis en doute l'accord de cessez-le-feu à reprendre leurs esprits, après que les Libyens aient accepté de mettre fin à la guerre", révélant "la demande des signataires à la Mission de l'ONU d'assister au départ des mercenaires du pays".
Commentant l'accord de cessez-le-feu lors des pourparlers de la Commission militaire mixte libyenne 5 + 5 à Genève, en Suisse, vendredi, M. Salamé a déclaré qu'il salue "le courage des signataires, et j'espère que ce sera un jour historique dans la marche du retour de la paix".
En réponse aux craintes de non-respect par des puissances extérieures de l'accord d'arrêter la guerre, le diplomate onusien a souligné "ce qui est important, c'est que les Libyens aient décidé de mettre fin aux combats", affirmant qu'"ils en informeront eux-mêmes les pays qui les soutiennent à l'étranger".
Toutefois, l'ancien envoyé spécial démissionnaire en mars dernier a réaffirmé qu'"il n'y a pas moyen de sortir de la crise en un jour", rappelant trois pistes de dialogue ont été conçues, économique, militaire et politique, cette dernière se réunissant virtuellement le 26 octobre et directement en le 9 novembre à Tunis.
En somme, le processus de normalisation en Libye semble, malgré les doutes les obstacles qui peuvent surgir, irréversiblement lancé et que plus rien ne peut arrêter tant que la volonté des Libyens de faire la paix prédomine.
FIN/ INFOSPLUSGABON/AGF/GABON2020
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