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Gabon : Le débat faussé de l’intégration des Pygmées

Gabon-Société-Pygmées

LIBREVILLE,  3 avril (Infosplusgabon) -  Tout peuple aspire à la liberté et au plein épanouissement de ses capacités physiques, intellectuelles, spirituelles et morales. Des faits qui garantissent l’émancipation communautaire.  Laquelle intègre également la notion d’épanouissement socio-économique.

 

 

C’est au nom de toutes ces considérations que la question de l’intégration des pygmées au sein des sociétés bantou se pose avec acuité dans l’Afrique post-coloniale, dont les communautés ont fait de l’égalité des chances de réussite de tous les citoyens, un impératif inaliénable.

 

Or, le constat est accablant : le bantou émancipé du joug du colonisateur blanc s’est investi du droit d’assujettir le pygmée, à ses yeux être inférieur, pour son mode de vie relevant encore des schémas primitifs. Ainsi, des programmes d’intégration de cette population vivant en marge des courants communs, ont été mis en œuvre par les gouvernements des pays où cette réalité s’impose.

 

Pourtant il semble que la solution au problème ne réside pas dans l’intégration systématique. En effet, l’intégration sous-entend qu’un peuple renie ses valeurs identitaires et adopte celles d’un autre, prédominant. Dans le cas spécifique des pygmées en Afrique centrale, cela signifie pour eux de sortir des profondeurs de la forêt équatoriale où depuis des millénaires ils ont bâti leur vie, sur des bases bien spécifiques qui ont permis jusque-là de gérer la destinée.

 

Sortir de la grande forêt pour intégrer les villages bantu ou les centres urbains, pose la question cruciale de la préservation du savoir multimillénaire dont ils sont dépositaires, qui comprend par exemple la plate-forme médicinale. Médecine des maladies physiques et mentales pour laquelle tant de patients issus des sociétés dites civilisées vont consulter les pygmées dans leur forêt, lorsque la médecine moderne est impuissante face à leurs attentes, malgré les fortunes énormes dépensées à cette fin.

 

Bien d’autres facultés relèvent de la dimension mystique, dans laquelle leur réputation est établie. Tout un patrimoine que l’on ne peut donc du jour au lendemain, décider de mettre entre parenthèses sans états d’âme. Surtout à une époque où le débat sur la question du patrimoine, immatériel notamment, est d’une pertinence sans précédent à l’échelle mondiale.

 

L’exemple du développement des langues humaines, pourrait certainement aider à cerner cette question délicate à plus d’un titre. En effet, on a beau déployer les énergies et les moyens pour, sinon empêcher, tout au moins limiter l’envahissement de la langue française  par des anglicismes plus proliférants que jamais. Rien n’y fait. La langue de Shakespeare s’impose en conquérante irrésistible de toute la planète terre.

 

Sur la lancée du siècle des lumières, l’expérience de l’Esperanto qui visait à établir une langue mondiale, faite d’une association de mots empruntés à plusieurs autres de notre planète au 19e siècle, a tourné court. De même la velléité de créer une langue nationale dans des pays ne possédant pas de médium véhiculaire.

 

C’est dire donc qu’une langue ne se décrète point pour qu’elle prenne corps. Personne n’a décrété la mise en route du Créole, ni du Pidgin. Ces parlers se sont imposés par un puissant fait historique.

 

De la même manière, il faudra un fait de l’évolution historique irréversible, pour que les pygmées, appelés aussi peuples autochtones, quittent la forêt pour s’installer définitivement dans les villages bantu et dans les centres urbains. Ils adopteront la civilisation du monde moderne, où ils évolueront avec des fortunes diverses. Indéniablement dans le même temps, d’autres se résoudront à demeurer dans la forêt profonde, où ils continueront à entretenir la vie selon les usages légués par une tradition multimillénaire. En tout cas nul ne peut être prophète infaillible en la matière.

 

Ce qu’un Etat lucide pourrait faire dans le sens d’une préservation véritable et rationnelle de ce patrimoine digne d’intérêt, c’est d’asseoir des politiques drastiques empêchant une déforestation effrénée aux conséquences désastreuses. Dans le sens de ne plus garantir à ces peuples un espace propice au développement de leur vie. Car la forêt, tel que le signifiait avec force un des défenseurs de cette cause : « la forêt pour les pygmées, c’est leur usine, c’est leur bureau, c’est leur hôpital, c’est leur supermarché, c’est leur centre de loisirs… La forêt, c’est leur tout ».

 

Un tout que l’on gagnerait à observer avec plus d’attention et de responsabilité. Particulièrement dans un monde dont les prouesses scientifiques, quand bien même fabuleuses au-delà de l’imaginable, connaissent tout de même des limites. Poussons et mûrissons alors le débat, dans une mesure qui ne s’accommode plus des distractions purement… folkloriques, auxquelles on veut faire revêtir un sérieux qui ne tient que du vernis.

 

FIN/INFOSPLUSGABON/BRT/2017

 

 

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