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Gabon : Quand le pays interroge notre conscience
08 Septembre 2016
Gabon-Démocratie-Election présidentielle-Tribune libre
NDJAMENA, 8 septembre (Infosplusgabon) - Omar Bongo Ondimba, père d’Ali, aurait dit qu’ « on n’organise pas une élection pour la perdre ». Et le fils qui s’empara du pouvoir paternel en 2009 aurait bien retenu la leçon. Le problème avec les dernières élections au Gabon, c’est que les choses ont changé. Et les acteurs surtout. Sans oublier l’essor de la technologie de l’information et de la communication.
A la précédente élection présidentielle déjà, l’opposition réunie avait obtenu plus de 50% des suffrages. André Mba Obame, ami intime de Bongo Fils avec qui il animait le courant des rénovateurs au sein du Parti démocratique gabonais (PDG-au pouvoir) et expert en trucage électoral de Bongo père alors qu’il était au ministère de l’Intérieur, avait cru son heure venir en quittant Ali Bongo Ondimba. Il avait sous-estimé l’expertise de ce dernier pour se maintenir au pouvoir.
André Mba Obame n’a pas non seulement perdu les élections mais il est aujourd’hui quatre pieds sous terre, suite à une maladie mystérieuse comme trois ou quatre autres ténors de la politique gabonaise.
Aujourd’hui, Ali n’a pas vu venir la bourrasque. Il a peut être sous-estimé la menace. Il a sûrement vu en son principal adversaire Jean Ping qu’une simple chinoiserie qui ne durera donc pas, au lieu de le prendre pour un sérieux casse-tête
chinois. Plus qu’André Mba Obame, Jean Ping joue dans la même cour qu’Ali Bongo Ondimba. Il a eu des enfants avec Pascaline Bongo, fille aînée de feu Omar Bongo, pièce centrale du pouvoir du patriarche.
Ping a été aussi patron de la diplomatie gabonaise pendant de longues années avant d’atterrir à la tête de l’Union africaine. Autant dire que l’homme a un carnet d’adresses aussi dense et important que la population chinoise. C’est donc un dragon…chinois que devait abattre Ali. C’est autant, pour le pauvre Ali, grimper la muraille de Chine !.
Mais revenons à l’élection proprement dite. Ping, fort du soutien des principaux ténors du pouvoir de Libreville dont Guy Nzouba Ndama, a sérieusement mis en difficulté Ali Bongo Ondimba . Ce qui est confirmé par les observateurs de l’Union EUropéenne. Mais les experts d’Ali Bongo Ondimba avaient dans leur botte une arme secrète : le Haut-Ogooué, la région dont sont originaires les Bongo. Avec un score stalinien. Ce qui passe mal auprès de nombreux observateurs.
Se barricadant derrière une loi bancale, Ali Bongo Ondimba refuse le recomptage des voix. La France, les Etats Unis, et l’Union européenne appellent à ce recomptage. L’Union africaine, après avoir gardé un silence bizarre, a finalement réagi en voulant envoyer une mission à Libreville. Beaucoup de ceux qui se rendront à Libreville doivent leur pouvoir à Bongo père.
Du moins leur longévité au pouvoir. Cela pèsera-t-il dans les démarches de l’Union africaine ? Aujourd’hui même si les rats n’ont pas quitté le navire Ali Bongo Ondimba, l’avenir ne semble pas intéressant pour lui. Son ministre de la justice a quitté ses fonctions ministérielles et a démissionné du parti. Et les pressions continuent à se faire sur Ali Bongo Ondimba.
En l’Union africaine, ses partisans cherchent à jouer la montre. Mais le déploiement des soldats français pour, dit-on, évacuer les Français du Gabon en cas de besoin n’est pas un bon signe.
Il est vrai que les problèmes africains doivent être prioritairement réglés par les Africains. Mais de nombreux chefs d’Etat africains ont fait pire qu’Ali Bongo Ondimba et n’ont aucune légitimité morale pour discuter avec les protagonistes de la crise gabonaise.
Un confrère ouest-africain a traité l’Afrique centrale de trou noir démocratique. Cela est peut-être vrai. Il a peut-être oublié que Sao Tomé est en Afrique centrale. Ce confrère interpelle sans doute la conscience de tous les citoyens de l’Afrique
centrale, y compris celle des dirigeants. On ne peut pas aussi demander aux dirigeants de l’Afrique centrale de respecter les règles démocratiques quand les citoyens eux-mêmes en commençant par les leaders de l’opposition font souvent le lit à ces trucages électoraux en s’illustrant par des divisions et des luttes inutiles.
Et même en cautionnant des lois scélérates comme des codes électoraux taillés sur mesure. Gagner une élection, c’est s’organiser en amont comme en aval. (Articla paru dans le journal Le Temps n° 897 du 7 au 13 septembre 2016)
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