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Logique des intérêts et guerre par procuration des puissances régionales ont eu raison des Libyens

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Tripoli, Libye, 13 avril (Infosplusgabon) - Jamais un pays n'aura suscité autant d'ingérences étrangères, au point de transformer le conflit en cours en Libye en un imbroglio politico-militaire inextricable, aux rebondissements interminables, avec ses longues épisodes à suspens, à la manière d'un feuilleton à sensation, ramenant sans cesse l'histoire à la case départ, mais avec la différence près que l'intrigue, ici, découle directement de la réalité amère avec, en prime, des victimes civiles libyennes et le risque, au finish, de la destruction de tout un pays.

 

 

Ce ne sont pas seulement les énormes richesses dont regorge le pays qui expliquent cette ingérence étrangère à outrance, qui a paralysé toute solution politique en Libye, mais un comportement "cynique" et "arrogant" dont se prévalent certaines puissances internationales et régionales pour faire prévaloir leurs intérêts, faisant fi de la vie millions Libyens sans défense, qui ne demandent qu'à vivre en paix, dans la dignité et la liberté et de profiter des potentialités de leur pays.

 

L'impasse dans laquelle a été replongé le processus politique en Libye, après la démission du Représentant spécial du Secrétaire général de l'ONU, Ghassan Salamé, est appelée à perdurer encore, au regard des difficultés rencontrées par Antonio Guterres pour nommer un remplaçant au Libanais sortant.

 

Après avoir jeté son dévolu sur Ramtane Lamamra, l'ancien ministre algérien des Affaires étrangères et diplomate africain chevronné, le Secrétaire génal de l'ONU a vu ses  plans contrés par les Etats-Unis, bien que la Libye ne figure pas parmi les priorités de l'administration du président Donald Trump.

 

Washington a eu une position qui s'est particularisée par un manque de clarté, alors qu'au début de l'attaque contre Tripoli, Donald Trump a eu un entretien téléphonique avec le maréchal Khalifa Haftar, le département d'Etat a, pour sa part, condamné l'offensive militaire, demandant le retour à leurs positions antérieures des troupes assaillantes de Haftar.

 

En fait, les Etats-Unis ne sont pas allés plus loin que cette position nébuleuse et ont fait preuve d'un désintéressement à l'égard de la crise en Libye.

 

La seule fois où les Etats-Unis ont semblé agir en direction de la Libye c'était dans le cadre de la lutte d'influence avec la Russie, lorsque des médias américains ont révélé la présence de mercenaires russes du groupe Wagner, un proche du Kremlin, en dénonçant les ingérences de Moscou, mais sans aller au-delà de simples gesticulations .

 

Cette opposition à la nomination de M. Lamamra, dont l'expérience et la connaissance de la région et de la Libye représentent un atout,  demeure une grande énigme pour les analystes.

 

Toutefois, des médias américains ont levé un coin du voile en rapportant que cette opposition des Etats-Unis est dictée par une requête présentée par les Emirats arabes unis, principal allié de Haftar, à l'administration américaine pour écarter le diplomate algérien et trouver un émissaire plus manipulable à leur goût, selon ces mêmes médias.

 

Une situation qui a révolté l'analyste politique libyen Saad Abdessalam al-Daimi, qui a conclu que "c'est dire que les puissances étrangères et certains pays se jouent du destin d'autres pays à leur guise, rien que pour préserver leurs intérêts en ramenant tout un pays et son peuple à la simple expression d'objets manipulables à volonté".

 

M. al-Daimi s'est interrogé: "car comment expliquer que la crise politico-militaire libyenne perdure plus de neuf ans après la révolution du 17 février 2011 et que l'attaque contre la capitale abritant un gouvernement légitime, reconnu par la communauté internationale, continue après un an de combats et d'affrontements armés devant l'impuissance du Conseil de sécurité des Nations unies.

 

Il a rappelé qu'"il aura fallu près d'un an et après plusieurs réunions infructueuses, pour que les membres du Conseil de sécurité des Nations unies daignent s'entendre sur une résolution demandant un cessez-le-feu immédiat et sans condition et l'adoption des engagements pris à la Conférence de Berlin, relatifs au renforcement de l'embargo et à la cessation des ingérences dans les affaires étrangères et le soutien aux processus de pourparlers portant sur trois volets, économique, politique et militaire".

 

Pour lui, "le combe c'est que cette résolution n'est pas contraignante, en raison de l'abstention de la Russie qui a formulé des réserves et n'a pas voté contre pour ne pas montrer ostensiblement son action de blocage dans le dossier libyen, tout en torpillant dans les coulisses les efforts visant à parvenir à un arrêt de la guerre".

 

Mohamed Al-Fitouri, activiste dans le société civile libyenne a souligné que "pourtant personne ne peut éluder les répercussions dévastatrices de la guerre de Tripoli sur les victimes si l'on se réfère aux statiques des organisations des Nations unies qui font état de plus de 380 civils tués et autant de blessés ainsi que le déplacement, de plus de 200.000 personnes fuyant leurs foyers en raison des combats dont plus de 150.000 de la capitale libyenne".

 

Il a rappelé qu'"outre ces déplacement qui fragilisent les conditions de vie des citoyens libyens, les difficultés rencontrées pour l'accès aux services de base comme le logement, les soins et l'eau et l'électricité ainsi que l'alimentation, qui pèsent sur les Libyens qui continuent à souffrir d'un confit qui les dépasse car commandé de l'extérieur par des puissances internationales et régionales qui en tirent les ficelles".

 

M. al-Fitouri a ajouté que "les coupures d'eau et d'électricité à Tripoli et dans plusieurs autres villes libyennes par des groupes armés de Haftar constituent une preuve que toutes les lignes rouges ont été franchies dans ce conflit et que plus rien n'arrête pour arriver à son but comme si la fin justifiait les moyens".

 

Il a cité l'hôpital d'al-Khadra à Tripoli, qui a été bombardé à trois reprises conduisant à une fermeture temporaire après des dégâts dans plusieurs services et la destruction de l'entrepôt de stockage des médicaments.

 

A noter que cette structure médicale est l'un des établissements destinés à accueillir les malades du Covid-19 en Libye.

 

La Mission d'appui des Nations unies en Libye (MANUL) a, par le biais du Coordonnateur humanitaire, dénoncé "l'utilisation de l'eau et de l'électricité comme une arme de guerre et un moyen de pression".

 

Toutes ces souffrances des Libyens n'ont pas fait bouger le moindre sentiment de compassion de ces puissances régionales et internationales qui s'ingèrent dans les affaires internes de la Libye, manipulent leurs sponsors locaux pour les inciter à davantage de destruction et de versement de sang pour contrer la politique de tel ou tel pays se faisant la guerre par procuration en Libye.

 

Des experts des Nations unies ont souligné dans des rapports que des puissances occidentales et européennes comme l'Italie et la France se livrent à une guerre par procuration, motivée par le contrôle des ressources pétrolières dont dispose la Libye.

 

Mais aussi des pays comme l'Egypte, les Emirats arabes unis, l'Arabie saoudite et la Russie,  soutiennent le camp de Haftar et fournissent équipement et armes ainsi que l'appui politique et financier.

 

Le camp du Gouvernement d'union nationale est soutenu par la Turquie et le Qatar.

 

A ces souffrances des Libyens vient s'ajouter la pandémie du coronavirus auquel fait face le pays qui a enregistré jusqu'à présent 25 cas d'infection.

 

Disposant d'une infrastructure de santé et d'un système sanitaire défaillants, la Libye doit compter essentiellement sur les dispositions de prévention contre la propagation du coronavirus. C'est pourquoi les autorités ont pris les initiative d'anticipation ayant trait à la fermeture des frontières et de l'espace aérien pour fixer la population et d'autres mesures relatives au confinement des citoyens, en interdisant les rassemblement sur les lieux publics en plus de la fermeture des restaurants, cafés, écoles et parcs.

 

Devant la poursuite des bombardements à l'aide d'obus, de missiles et autres roquettes et frappes aériennes, ciblant les quartiers résidentiels, tuant des civils, les citoyens sont de plus en plus exposés au risque de contamination au coronavirus, au regard de la menace qui plane sur eux de voir tomber à tout moment un obus sur leurs maisons.

 

Malgré l'acceptation par les deux belligérants d'un appel à la trêve humanitaire par plusieurs pays et organisations internationales, les bombardements ont continué, mettant en danger la vie des civils et faisant obstacle à la mise en œuvre des plans élaborés par les autorités locales pour contrer l'épidémie du coronavirus.

 

Khaled Mustapha al-Hadad, professeur universitaire libyen, a estimé que "le processus politique étant dans l'impasse depuis la démission le 2 mars de l'Envoyé de l'ONU en Libye, Ghassan Salamé, la crise de la pandémie du Covid-19 au niveau mondial a détourné l'attention de la Libye, ce qui a encouragé l'escalade militaire actuelle".

 

Il a rappelé que "l'ancien Envoyé de l'ONU, Gassan Salamé, bien qu'il soit accusé d'avoir été à la solde de la France et d'être soutenu par les Etats-Unis, a souligné que la crise en Libye ne peut avoir qu'une solution internationale avec l'implication des pays concernés par les affaires libyennes", ajoutant que "c'est pourquoi il a tenté avant de jeter l'éponge d'harmoniser les positions au sein de la communauté internationale dont les divergences se sont reflétées au sein du Conseil de sécurité de l'ONU, rendant cette instance onusienne inopérante sur la Libye".

 

Il a souligné aussi que "les efforts déployés par la chancelière allemande, Angela Merkel, à travers la Conférence de Berlin, pour mobiliser la communauté internationale en vue de l'adoption d'une position commune pour une solution politique en Libye, ont débouché sur un échec en raison des manœuvres en coulisse de certains" pays présents.

 

"Comment expliquer qu'après les engagements pris par ces pays pour consolider l'embargo sur les armes en Libye adopté depuis 2011, dès le lendemain, on commence à envoyer des armes et combattants en Libye, comme si la rencontre de Berlin n'était que de la figuration et une comédie de mauvais goût?", s'est demandé M. al-Hadad.

 

A cet égard, le président du Conseil présidentiel du Gouvernement d'union nationale, Fayez al-Sarraj, a donné une définition très réaliste de la Communauté internationale dont il a dit qu'elle n'existait pas en tant qu'entité autonome.

 

Dans un discours à l'occasion du premier anniversaire de l'attaque de Tripoli, M. al-Sarraj a indiqué qu'en fait il s'agit d'un ensemble de pays pris individuellement qui agissent et se positionnent en fonction de leurs intérêts.

 

A partir de là, tout devient compréhensible, et le sort de la Libye sera encore pour longtemps l'otage de cette Realpolitik.

 

Il sera ballotté entre les intérêts et les égoïsmes des pays, même si ce sera au détriment des vies d'êtres humains innocents qui ne demandent qu'à vivre en paix à l'instar des autres peuples du monde.

 

 

FIN/INFOSPLUSGABON/SER/GABON2020

 

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