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Quelles répercussions aura la démission de Ghassan Salamé sur le processus de médiation en Libye?

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Tripoli, Libye, 6 mars (Infosplusgabon) - La démission du Représentant du Secrétaire général de l'ONU en Libye, Ghassan Salamé à un moment où le processus politique libyen a été relancé après plus de dix mois d'impasse en raison de l'offensive militaire lancée maréchal Khalifa Haftar le 4 avril contre Tripoli, intervient à un stade très délicat de la phase de règlement de la crise libyenne à l'égard de laquelle la Communauté internationale s'est, dernièrement, investie pour trouver une solution négociée dans ce pays d'Afrique du Nord.

 

Chef de la Mission d'Appui des Nations unies en Libye (UNSMIL), Ghassan Salamé menait une médiation et de facilitation entre les différentes parties libyennes pour aboutir à une solution dans le pays, réussissant, tant bien que mal, à lancer trois volets de dialogue relatifs à la politique, l'économie et la sécurité bien que les obstacles persistent toujours en raison des divergences entre belligérants libyens.

 

Les efforts menés par M. Salamé, ont été largement salués aussi bien au niveau local, par différents milieux qu'au niveau extérieur, rendant hommage à sa "ténacité" et  à "l'efficacité avec laquelle il s'est acquitté de son devoir à la tête de la mission onusienne en Libye.

 

Sixième émissaire onusien en Libye depuis 2011, Salamé a été, de loin, de l'avis des observateurs, celui qui aura réalisé le plus de progrès sur la voie d'une solution avec l'adoption d'une résolution du Conseil de sécurité sur un cessez-le feu et l'entérinement des engagements de la Conférence de Berlin relatifs au respect de l'embargo et de la cessation des ingérences.

 

Même si les pourparlers actuellement en cours à Genève ont été entachés de revers notamment par le boycott par les deux Assemblées libyennes du premier round des discussions politiques et l'absence de progrès au niveau du Comité militaire conjoint libyen 5+5, l'espoir de surmonter ces obstacles conjoncturels était toujours présent, selon ces les observateurs de a scène politique en Libye.

 

En effet, M. Salamé a récemment dévoilé à la presse que s'il n'avait l'espoir que la crise en Libye pouvait avoir une solution, il n'aurait pas accepté de rester à la tête de la mission de l'ONU.

 

C'est dire que cette démission surprise qu'il a justifiée par des "raisons de santé" pourrait bien s'expliquer par une détérioration subite de son état de santé et une fatigue, ont souligné ces mêmes observateurs.

 

Lors de la dernière conférence de presse à l'issue du premier round politique à Genève, M. Salamé est apparu très remonté et passablement énervé, dénonçant la manque de respect par les parties politiques libyennes de leurs engagements et des contre vérités colportés sur le dialogue politique.

 

Mais au-delà des causes qui ont poussé l'envoyé de l'ONU Ghassan Salamé à démissionner donnant lieu à diverses versions, c'est l'impact de cette démission sur la poursuite du processus de recherche d'un règlement en Libye qui suscitent des interrogations.

 

Pour le membre du Haut Conseil d'Etat, assemblée consultative, Abderrahman al-Chater "Ghassan Salamé a préféré anticiper en démissionnant avant d'être démis de ses fonctions", soulignant qu'il a commis de nombreuses erreurs comme chef de la mission onusienne.

 

Jumaa al-Taher Hmida, un employé dans une entreprise de télécommunications à Tripoli a estimé que "Ghassan Salamé a été soumis à de fortes pressions de la part des pays qui soutiennent Haftar au point de le pousser à la démission".

 

M. Hmida a souligné que "ces pays on voulu qu'il prenne fait et cause pour Haftar lors du processus politique en faisant valoir les exigences de son camp et en refusant de le nommer explicitement comme responsable dans les violations et crimes commis en Libye".

 

Marwane Mohamed al-Madani, un activiste politique libyen a affirmé que "la chute de Ghassan Salamé a été précipitée par sa partialité à l'égard des camps en conflit en Libye en prenant partie pour le camp de Haftar se refusant à le condamner ni à agir contre ses crimes de bombardements contre les civils et les atteintes contre le droits de l'homme et humanitaire ainsi que les crimes de guerre perpétrés partout en Libye".

 

Il a dénoncé que "des Libyens aient été placés dans un liste noire et font objet de sanctions et classés comme terroristes alors qu'ils ont commis des fautes de moindre importance que Haftar qui jouit toujours du soutien des pays étrangers en raison de la non dénonciation par Ghassan Salamé de ses crimes".

 

M. al-Madani a souligné aussi que "Ghassan Salamé ne dévoilait pas toute la réalité au Conseil de sécurité et ses comptes rendus étaient toujours entachés de partialité".

 

Commentant la démission de Ghassan Salamé, son compatriote du Libanais, Tarek Mitri, ancien envoyé de l'ONU en Libye, a déclaré jeudi que l'envoyé démissionnaire de l'ONU, , "avait fait face à deux difficultés" dans l'exercice de ses fonctions à la tête de la mission de l'ONU.

 

"La tâche est extrêmement difficile, étant donné la réticence du Conseil de sécurité à assumer sa responsabilité ou son incapacité, et la pratique de certains pays influents ayant une double politique", a écrit M. Mitri dans un tweet.

 

Le diplomate libanais, qui a servi en Libye entre 2012 et 2014, a ajouté: "Quant au rôle de médiation, il était semé de risques, renforcé par le manque de volonté de compromis, surtout chez ceux qui s'illusionnent de pouvoir l'emporter (militairement)". Il a conclu en disant: "Je joins à ma voix pour implorer que Dieu préserve la Libye".

 

Abordant les répercussions de cette démission sur le réglement de la crise libyenne, Hussein Salem al-Fitouri analyste politique libyen souligne que "le départ Ghassan Salamé pourrait, en raison de son effet surprise, représenter une source de perturbation au processus", ajoutant, toutefois, que "cela ne peut pas perdurer étant donné que l'émissaire de l'ONU est entouré de tout un staff d'experts et conseillers onusiens qui font un travail de fourmis en coulisse".

 

Ainsi, il a indiqué que "les acquis relatifs à l'avancement et les documents de négociations et aux points d'achoppement et tous les aspect de la médiation seront hérité par le successeur de Ghassan Salamé pour y construire dessus ou apporter des révisions de manière à avancer".

 

Selon lui, "incontestablement l'émissaire de l'ONU de part sa personnalité, son tempérament, son bagage intellectuel et son expérience pourrait avoir une vision spécifique qui pourra servir de déclic et trouver la brèche qui manquait pour reconstruire le puzzle et sortir la Libye de l'ornière".

 

Notons que le Secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a dévoilé vouloir s'atteler sur la préservation des acquis laissé par Ghassan Salamé en veillant à réaliser une transition flexible de nature à permettre la poursuite du rôle des Nations unies comme facilitateur en Libye.

 

L'activiste de la société civile en Libye Yasser Nasser al-Ferjani a souligné que "la démission de Salamé n'aura aucun effet sur la recherche d'une solution en Libye", indiquant que "la clef de la solution ne se trouve pas dans les mains des émissaires onusiens sinon il n'aurait pas fallu, depuis 2011 jusqu'à présent, six envoyés des Nations unies, sans que l'un d'entre eux ne puisse trouver une solution à la crise dans le pays en proie à l'insécurité et à li'nstabilité depuis la révolution du 17 février".

 

M. al-Ferjani a rappelé que "les Nations unies et Ghassan Salamé ont échoué depuis le 4 avril, date du déclenchement de la guerre de Tripoli, à instaurer un cessez-le feu en Libye", indiquant qu'"en mai un mois après le déclenchement de l'offensive contre Tripoli, la mission onusienne a demandé une trêve humanitaire à l'occasion du mois de ramadan pour secourir les civils sans que sa requête ne soit entendue et à l'occasion de l'Aïd al-Kebir en août dernier une trêve a été acceptée pour trois jours mais a été violée dès les premières heures".

 

Il a indiqué à cet égard que "la seule trêve qui a pu tenir malgré sa fragilité et ses multiples violation est celle du 12 janvier à l'appel des président russe Poutine et turc Erdogan ce qui dévoile que se sont les pays étrangers qui détiennent la clé de la solution et non les Nations unies".

 

"La démission de Salamé dénote de la faillite des Nations unies et de la perte de son influence dans le monde au détriment des grandes puissances devenant un instrument manipulé par certains pays jouissant du droit véto qu'il utilisent pour servir leurs propres intérêts", a ajouté l'activiste de la société civile, signalant que "la Libye avec ses richesse fait l'objet des convoitises de nombreux pays ce qui en fait un terrain fertile aux ingérences ayant débouché sur une guerre par procuration".

 

Oussama Fraj Salem, professeur de sciences politiques partage cette analyse de M. al-Ferjani, déclarant que "les ingérences étrangères en Libye sont telles que les libyens eux-mêmes ont perdu la capacité de contrôler cette guerre pilotée de l'extérieur pour des considérations qui dépassent les intérêts des Libyens et de la Libye".

 

Il a plaidé pour que "les Libyens se ressaisissent pour s'approprier leur propre destin et dialoguer entre eux directement sans tenir compte des pressions extérieures pour arriver à une solution préservant leur pays, son unité et toutes ses potentialités".

 

 

FIN/INFOSPLUSGABON/RET/GABON2020

 

 

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