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15 Avril 2015
GABON-Politique-Décès d'André Mba Obame
Par Antoine NKOLO LAWSON
LIBREVILLE, 15 avril (Infosplusgabon) - Le décès dimanche d’André Mba Obame à Yaoundé s’est vite répandu à travers l’Afrique et au-delà du continent. Tout le monde le savait malade et sa santé ne cessait de se détériorer de manière inquiétante depuis qu’il a quitté, sans le vouloir, l’arène politique nationale.
Homme politique brillant, André Mba Obame avait eu la chance de démarrer une carrière politique palpitante aux côtés de feu Omar Bongo Ondimba. La politique semble lui avoir tout donné. Nous dirons presque. ET comme Obélix, un personnage de fiction créé en 1961 dans la bande dessinée Astérix, Mba Obame est bien tombé dans la « soupe politique gabonaise » avec ses exigences, ses compromis, mais aussi avec le jeu secret des alliances qui ne dissimule pas toujours les ambitions personnelles des individus.
La politique, André Mba Obame devrait en consommer avec modération. Mais quand survint le décès d’Omar Bongo Ondimba en 2009, Il s’est vu pousser des ailes et la rivalité aidant entre ses amis du Parti démocratique gabonais (PDG-au pouvoir), il décida de se porter candidat à l’élection présidentielle non sans vouloir « décortiquer » un système politique qui a fait de lui un présidentiable.
Seul contre toute une machine huilée malgré une popularité saisissante
Dans le mesure où il se situait d’emblée sur le terrain politique avec une chance certaine de réaliser un bon score lors de la présidentielle de 2009, André Mba Obame cristallisa tous les mécontentements dans sa famille politique lorsqu’il se présentât comme l’héritier d’Omar Bongo Ondimba auprès de qui il fit ses classes.
L’étrange destin d’André Mba Obame incarne à merveille une sorte d’ambivalence. Il mit à profit les avantages que lui conférait sa position et, en premier lieu, sa maîtrise du fichier électoral en tant que ministre de l’Intérieur pour satisfaire son appétit de pouvoir.
Cette démarcation subite du candidat Mba Obame, dopée par les appels incessants de ses sympathisants l’entrainera contre un mur où la logique politique n’est pas de règle au Gabon. Il paiera ensuite de sa vie. Au-delà de la dimension humaine d’André Mba Obame, sa carrière politique a révélé tour à tour l’homme brillant à travers les portefeuilles ministériels qu’il a occupés et l’homme courageux qui n’a pas craint d’affronter ses « Amis politiques » dont Ali Bongo Ondimba.
Contesté et contestable au sein de sa propre famille politique, l'enfant de Medouneu est devenu réfractaire aux lignes partisanes obligées des partis politiques. André Mba Obame symbolisera le temps d’une campagne présidentielle l’indépendance en politique. Il se confiera une mission : former une opinion publique saine pour contrer les effets du Parti démocratique gabonais dont il dénoncera certaines pratiques lors de ses meetings...
Orateur exceptionnel, il fera courir les foules à travers le pays tout en suscitant les interrogations et les inquiétudes sur sa sécurité et ses réelles ambitions politiques. Ainsi, André Mba Obame concentra l’électorat Fang, une stratégie cachée car longuement entretenue et qui se dévoile peu avant la présidentielle de 2009. L'opposition étant à son habitude divisée, les Blocks Ali Bongo Ondimba et André Mba Obame partaient théoriquement favoris dans cette élection présidentielle à UN tour même si Casimir Oyé Mba qui s'est désisté la veille du scrutin n'a pas osé plonger "dans la bataille".
André Mba Obame, libre mais sans degré de liberté
Le destin fascinant de cet homme libre s’est déployé pendant la phase la plus décisive et la plus déterminante de sa vie publique. La plus éblouissante même. Elle plonge l’électeur gabonais acquis à sa cause au cœur même des multiples ruptures et continuités des remuantes années 1990-2000, après la Conférence nationale.
Né le 15 juin 1957 à Médouneu dans le département du Haut-Komo, André Mba Obame a fait ses études secondaires au petit séminaire Saint-Kizito d’Oyem, au Séminaire Saint Jean à Libreville puis au lycée Léon Mba. Diplômé de l'Université Laval et de l'Université Panthéon-Sorbonne, il était docteur en science politique.
Victime d'une sciatique paralysante et d'un accident vasculaire cérébral, André Mba Obame a parcouru de nombreuses capitales pour suivre un traitement adapté. Une véritable et pénible course contre la montre.
En 1984, alors âgé de 27 ans, il intègre le cabinet d’Omar Bongo. Il se rapprochera d'Ali Bongo Ondimba qui envisageait déjà de constituer le groupe des « Rénovateurs » au sein du Parti du président. Après la conférence nationale de 1990 qui voit l’instauration officielle du multipartisme au Gabon, il rentre au gouvernement et prend successivement les portefeuilles du ministère de l'Agriculture, celui des Droits de l'Homme et des Relations avec les Assemblées. En 1991, il quitte le Gouvernement pour des raisons constitutionnelles, la constitution gabonaise interdisant à tout Gabonais âgé de moins de 35 ans d’occuper des fonctions ministérielles.
En 1996, il est élu député du premier siège du département du Haut-Komo. Son retour au gouvernement intervient en 1997, aux fonctions de ministre des Relations avec les Institutions constitutionnelles, porte-parole du gouvernement.
En février 1999, à la suite de l’élection présidentielle de 1998 et au remaniement gouvernemental qui s'ensuit, il est nommé ministre de l’Éducation nationale, porte-parole du gouvernement jusqu’en janvier 2002, date à laquelle il occupe les fonctions de ministre de la Solidarité nationale, des Affaires sociales et du Bien-être.
Après l'élection présidentielle de 2005, il arrive au ministère de l’Intérieur, de la Sécurité et de l’Immigration. Son passage dans ce département s'illustre par l'attaque du siège de l'Union du peuple gabonais (UPG) de Pierre Mamboundou le 21 mars 2006, qu'il justifie par la recherche d'armes de guerre, l'arrestation des leaders de la société civile le 30 décembre 2008 et la répression des manifestations syndicales. Tel un boomerang, sa station de télévision TV+ est prise à partie et ses installations confisquées jusqu'à ce jour.
Mba Obame fut également fortement critiqué par la presse après avoir (dit-on) proposé de vendre à la Guinée équatoriale l'île de Mbiané (inhabitée mais donnant potentiellement accès à des réserves de pétrole), revendiquée par celle-ci depuis 1972.
Peu après la nomination d'Ali Bongo Ondimba comme candidat du PDG, André Mba Obame prononce un discours à l'hôpital Quiron (Espagne) là même où le défunt président était hospitalisé. Dans ce discours du 17 juillet 2009, intitulé « l'Appel de Barcelone », il se porte candidat à l'élection présidentielle anticipée du 30 août 2009.
Il y déclara qu'après 25 ans d'apprentissage et de collaboration étroite aux côtés d'Omar Bongo Ondimba, il était préparé à la "Tâche". Le destin en décidera autrement...
FIN/INFOSPLUSGABON/LDK/GABON 2015
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